« What a surprise ♦ Patrick & Emma »

Les obligations dues à une fonction n’étaient jamais très plaisantes, j’étais bien placée pour le savoir. C’était ce qui avait un peu provoqué mon côté rebelle à l’époque de l’adolescence, l’envie de ne pas faire ce qu’on me demandait, de ne pas comporter comme l’exigeait mon rang. C’était un comportement qui avait d’ailleurs perduré jusque tard, même à l’époque où j’avais fait connaissance du sénateur. Sans doute que maintenant, je n’agirais plus de la même façon. Mais à l’époque, c’était tellement facile de provoquer les gens subtilement. Et le sénateur avait été l’un des premiers à marcher dans mes combines. Une certaine complicité était née entre nous, ce qui nous avait permis de beaux petits jeux. J’étais beaucoup plus sage maintenant mais je devais bien avouer que c’était une perspective qui me tentait encore. J’avais l’impression de revenir des années en arrière, avec ma jambe qui venait doucement caresser celle de Patrick sous la table. De quoi me donner certaines envie de revenir en arrière, au temps de l’insouciance, au temps où rien ne comptait que de s’amuser.

« Je garde d’excellents souvenirs de vos mises en danger… »

J’esquissai un sourire et repris une gorgée de mon verre de champagne. Le sénateur Clifford me connaissait si bien, il savait ce que j’appréciais vraiment. Rares étaient les hommes à savoir quoi m’offrir dans ce genre de circonstances. Et non, je n’étais pas superficielle. Je ne m’attardais pas à des choses de ce genre quand je fréquentais quelqu’un, c’était juste que je m’autorisais un certain luxe, vu que je pouvais me le permettre. Ce n’était pas pour autant que je n’étais pas une jeune femme simple. Je n’avais pas de femme de ménage ni de personnel de maison, comme la maison familiale que j’avais encore à Moscou. Je faisais tout moi-même, je n’avais besoin de personne. Je ne voulais de l’aide de personne. Déjà au temps où je m’étais pris une balle dans l’épaule – et ce n’était pas un accident – je m’étais débrouillée seule à la maison, avec un bras en moins. Je voulais vivre comme toutes les jeunes femmes de mon âge, comme toutes les femmes de cette île. D’ailleurs, tout le monde me considérait comme telle ici. Et je m’en portais merveilleusement bien.

« Il vous faudrait plus qu’une après-midi pour tout découvrir, sénateur. Cette île est petite mais elle regorge d’endroit délicieux… »

Surtout quand on fréquentait Hot’Lux, le quartier populaire et chaud de l’île. C’était là que se retrouvaient les gens qui aimaient sortir et draguer, c’était vraiment LE lieu de rencontre de l’île. Ce n’était pas des endroits que j’aimais personnellement fréquenter. A choisir, je préférais les bars en bord de mer que ceux qui étaient  à l’intérieur et qui étaient généralement bondés. Même si j’avais été stripteaseuse et serveuse dans l’une des boîtes du Hot’Lux. Et oui, moi, la princesse, avait été autre chose. Et j’avais assez aimé cette période. Où plus rien d’autre ne comptait que l’amusement que je pouvais prendre. C’était une période qui n’avait pas duré longtemps, la réalité m’avait vite rattrapée. Mais je m’étais bien amusée, je ne regrettais rien, et c’était ça l’essentiel.

Je ne pus m’empêcher de me mordiller doucement les lèvres en sentant le pied du sénateur remonter le long de ma jambe pour s’y trouver assez haut. Grâce à la nappe, merci Krishna, personne ne pouvait voir notre petit jeu. Mais mes yeux étaient brillants, Patrick Clifford devait bien savoir l’effet qu’il me faisait. Avec le temps, les choses n’avaient pas changé. Et maintenant, j’étais encore plus joueuse que par le passé, j’avais l’expérience en plus. J’étais tentée de faire plus de choses, plus spontanée et affirmée aussi. Il m’avait fallu un long chemin pour en arriver là mais j’y étais parvenue quand même. Je m’assumais enfin en tant que femme.

« Les endroits tranquilles sont plus nombreux que l’on ne pense… Je me ferais un plaisir de vous les faire découvrir… »

Bizarrement, je n’étais pas étonnée que le sénateur me propose un endroit calme. Après tout, il aurait l’occasion de visiter l’île avec ses collaborateurs et de profiter des lieux populaires dont je lui avais parlé un peu plus tôt. Ainsi que le quartier des affaires, dans lequel j’avais mon petit bureau. Enfin, petit…  J’occupais quand même deux étages d’un bâtiment hyper moderne. Dans lequel je me sentais bien. Tellement bien que j’y avais installé un petit espace détente pour quand j’en avais besoin. Et ça m’arrivait, oui oui.

« Et bien, quand vous avez un peu de temps devant vous, faites-moi signe, je me ferai un plaisir de vous faire découvrir quelques petits coins de paradis… »

Et à vrai dire, j’avais déjà quelques idées. A force d’aller me balader, un peu partout, j’avais fini par découvrir des endroits fabuleux. Où je n’avais jamais rencontré beaucoup de monde. Et j’étais prête à en faire faire connaissance au sénateur. Après tout, il faisait partie de mon passé, il avait été une personne qui avait compté pour moi, je pouvais bien lui faire partager un peu de mon univers ici…